Logo Club du Large

Ces sponsors qui acceptent de “s’effacer” derrière une cause

©  Eneour Leost

Le 28 avril, 33 marins de la classe Imoca prennent le départ de The Transat CIC, entre Lorient et New York. Parmi eux, certains naviguent sur des bateaux qui portent le nom d’une cause sociétale plutôt que d’une marque. Dans un sport d’image, c’est un choix stratégique fort. Pourquoi certains sponsors acceptent de passer au second plan derrière un message, comment s’y retrouvent-ils ? Eléments de réponse.

Quel est le point commun entre Sam Davies (Initiatives Cœur), Violette Dorange (DeVenir) et Tanguy Le Turquais (Lazare) ? Ces trois skippers naviguent sur des Imoca dont le nom de course est celui d’une cause, et non pas celui du ou des sponsors qui les financent – Initiatives est cependant le nom d’un des trois partenaires principaux de Sam Davies, avec K-Line et Vinci Énergies. Quand on pense à ce type de partenariat, ce projet Initiatives Cœur fait figure de pionnier. Lancé dès 2012 par Tanguy de Lamotte avec Initiatives, il a été poursuivi en 2017 avec Sam Davies. La mécanique est simple : lors de chaque grande course, les sponsors-mécènes du projet financent par leurs dons des opérations du cœur d’enfants malades ne pouvant pas être soignés dans leurs pays, via l’association Mécénat Chirurgie Cardiaque.

Entreprise française de fabrication de menuiseries en aluminium basée en Vendée, K-Line est arrivée dans le projet en 2014. “Tanguy de Lamotte avait crevé l’écran lors de son premier Vendée Globe, en 2012-2013, raconte Jean-Pierre Liébot, président du groupe Liébot, propriétaire de la marque K-Line. Nous avons eu un coup de cœur pour le skipper et surtout pour la cause. En s’engageant comme sponsor du bateau, il fallait également devenir mécène de l’association Mécénat Chirurgie Cardiaque. Touchés par cette idée, nous nous sommes lancés dans l’aventure.”

Tanguy Le Turquais porte également un engagement sociétal fort, auprès de l’association Lazare, qui propose des colocations entre sans-abris et jeunes actifs. PDG de Hellio, entreprise spécialiste en maîtrise de l’énergie et partenaire principal du projet, Pierre Maillard raconte lui aussi une histoire de coup de cœur : “Quand on a rencontré Tanguy, on a été séduit par sa générosité, sa simplicité et sa volonté de s’engager sur une thématique qui va bien au-delà de l’exploit sportif. C’est vraiment ce qui nous a convaincus de nous engager.” 

Ambassadrice des Apprentis d’Auteuil, Violette Dorange souhaitait elle aussi donner un sens humain à son projet sportif, en soutenant la jeunesse en difficulté. Elle a réuni autour d’elle une agglomération de partenaires, dont 200 restaurants McDonald’s. “Violette a eu la chance de naître au bon endroit et de faire ce qui lui plaît. Elle veut redonner à la société ce qu’elle a reçu. Naturellement, elle a souhaité porter un projet qui ne soit pas 100% commercial”, explique Arnaud Dorange, conseiller stratégie et partenariats, et père de la navigatrice.

“Un partenariat très structurant”

Si les marins sont forcément convaincus du bien-fondé de la démarche, encore faut-il trouver des partenaires capables de s’effacer pour défendre une cause plus importante que le sponsoring et la visibilité, comme le dit Pierre Maillard. “Nous aurions très bien pu monter un partenariat traditionnel avec un Imoca qui se serait appelé K-Line, mais ce n’est pas ce que nous voulons, assure de son côté Jean-Pierre Liébot. Notre objectif est d’abord de sauver des enfants, avant de faire de la notoriété. C’est une grande fierté de contribuer à sauver des vies. Cela donne beaucoup de sens à l’engagement. On investit des sommes importantes, mais on accepte sans problème d’apparaître en retrait sur le bateau.” 

Même s’il soutient une démarche solidaire, un sponsor a toujours besoin de s’y retrouver en matière de retour sur investissement et/ou de notoriété et, d’après les témoignages recueillis, cela semble être le cas. “En interne, on observe une belle dynamique collective et solidaire, poursuit Jean-Pierre Liébot. Nos clients ont aussi beaucoup de sympathie pour Initiatives Cœur et ils nous identifient comme sponsor-mécène car nous apparaissons tout de même sur l’Imoca. Cela participe à la notoriété de la marque.” Même constat pour Pierre Maillard chez Hellio : “Notre engagement génère de l’adhésion et un projet global d’entreprise. Les collaborateurs sont touchés par cette cause et ils s’investissent. On embarque plein de gens avec nous. C’est très structurant, un vrai socle pour notre engagement RSE.”   

Le mot de la fin est pour Arnaud Dorange : “Je ne vois pas d’autres sports où on peut mettre une cause devant des produits commerciaux. C’est formidable mais pas forcément évident car beaucoup de marques préfèrent avoir leur nom en gros plutôt que caché. Il faut prendre du recul et la démarche n’est pas facile à faire comprendre. Violette et tous les autres marins qui mettent au premier plan des messages sociétaux naviguent un peu à contre-courant. Mais quand on est marin, on fait souvent du près !” 

Articles en relation

Ne manquez
aucune nouvelle